Un livre monde

À BAS LA LIBERTE → RETOUR AUX FONDAMENTAUX DU ROMAN

Une société qui ne crée que des visions du passé doit s’interroger sur son impuissance à inventer le Présent
et sur les messages qu’elle compte laisser aux générations futures.

                                         A Bas ! la Liberté

 

Je raconte des histoires et je peins des idées

J’ai 5 ans et mal aux dents.

Ma mère m’emmène chez le dentiste. Rue du Château-des-Rentiers nous croisons une grosse dame avec un gros bouton sur le nez : – Hé t’as vu la grosse dame avec son gros bouton sur le nez ? A défaut de paire de claques ma mère essaye de me convaincre qu’il ne faut pas dire des « choses comme ça ». L’éducation contre l’instinct → l’hominisation… Ce qu’on appelle aussi : se civiliser ! Au seul motif de vous abrutir et vous faire entrer dans le rang ! Une vie d’adulte à s’entraîner… A ne plus dire : la grosse dame avec un gros bouton sur le nez. Mais : la dame avec un nez. Le problème c’est qu’à force de le dire on finit par le penser. Et à force de le penser ça empêche…

Ça empêche de penser !

Lorsque je suis devenu écrivain tout cela a sauté. D’un coup j’ai retrouvé ma cervelle en entier. Avec la grosse dame de la rue du Château-des-Rentiers. C’est peut-être pour cela qu’on devient écrivain…. Pour pouvoir écrire : la grosse bonne femme avec un gros bouton sur le nez. Pouah !

Vous allez vivre une expérience inoubliable : ce petit enfant qui a mal aux dents…

→ c’est vous !

 

L’hominisation [dans ce grand bazar qu’est le Monde]

À Bas ! la Liberté  – qui aurait pu tout aussi bien s’intituler Comment s’occuper (intelligemment !) en attendant la mort (but et moyen de toute littérature) – réconcilie deux formes antinomiques : le roman et l’essai.

Argument : un écrivain qui ne sait quoi écrire… (et ce livre à cette activité pour empêcher son ciboulot de tourner à vide!) entreprend de vider « tout ce que peut contenir » la cervelle d’un être humain : à savoir la sienne ! Oi mi ricordo… Je me souviens. Au final l’entreprise est réussie parce qu’elle a raté → au lieu de se souvenir… il a inventé des tas d’histoires : 303 ! pour être précis. Quand on veut trouver quelque noblesse à ce qui n’est en fait que l’expression d’une maladie mentale on appelle cela pompeusement : la création.

Tout travail de mémoire est un acte de création dont la littérature est la posture extrême.

Vous entrez dans un univers :

à travers la vie des habitants d’un immeuble situé à Paris/rue du Commandant Mouchotte (les Mouchottiens) l’ouvrage rend compte de la société et de la condition humaine à une époque charnière depuis que les humains se sont sédentarisés au début du Néolithique et qu’ont été créées les premières cités. À savoir : quand les mâles sont devenus dominants et ont dû trouver des solutions appropriées ! à des tas de problèmes inédits et pratiques (comme se partager les femmes / se répartir les enfants… et les biens mobiliers et immobiliers). Et ont inventé pour cela le « couple » et la propriété privée.

10 000 ans plus tard… on en est toujours là !

Pas vraiment… quand s’achève la narration on a changé de modèle de société. On a changé d’échelle : le monde est devenu plus « petit ». Photographiable dans sa totalité depuis l’espace. Touristique : à quelques heures d’avion le temps d’un week-end. Virtuel : à la vitesse de la lumière. Au rythme du Net et des ordinateurs. Les sentiments aussi ont rétréci : le sexe a sombré dans l’automatisme et l’indigence. Est devenu une bouffonnerie dont on pourra se passer dans le futur proche (grâce aux progrès de la science). L’amour n’est plus un idéal ni une valeur absolue. Le couple ainsi que la propriété privée (et les aliénations qui leur sont liées : allégeance au mâle dominant/accumulation des richesses ect.) sont devenus des notions sinon obsolètes.

Du moins qui ne font plus rêver.

L’Homme fragmenté

À Bas ! la Liberté rend compte (sous forme d’investigation littéraire en temps réel) des changements anthropologiques à une période charnière qui n’a d’équivalent que le passage du Paléolithique au néolithique. 

Tome 1 = 1962 – 1982
Les 20 merveilleuses
Tout va mal / on est bien

Tome 2 = 1982 – 2022
Les 40 merdeuses
Tout va mal / on est mal

Fig. On a changé d’époque…      
de civilisation peut-être        

Aux modes de vie fragmentés d’aujourd’hui correspond un nouveau type d’humanité :

L’Homme fragmenté

Né du zapping et d’existences sans saveur faites de petits bouts sans consistance qu’il ne parvient plus à raccorder.

A mesure que l’on avance dans le roman… pris au piège du libre arbitre dans une société en perte de repères les Mouchottiens ont de plus en plus de mal à s’assumer. L’aliénation ne vient plus (comme dans les tyrannies du passé) d’un Etat qui voudrait tout surveiller et punir selon son bon plaisir… mais des individus qui cherchent à s’aliéner volontairement pour des raisons de sécurité et de confort. Internet et les algorithmes sont un assemblage parfait pour l’avènement de cette servitude volontaire.

L’enfer climatisé est pavé de bonnes intentions.

Comment en est-on arrivé là ? Années 1970 : au début du récit les habitants de l’immeuble Mouchotte vivent dans une société qui offre un maximum de liberté et d’abondance. Une société hédoniste tournée vers la jouissance immédiate et les loisirs à répétition telle que l’humanité n’en a sans doute jamais connu auparavant. À travers les aventures burlesques des Mouchottiens apparaît une autre réalité. Passée une courte période de fun et de découvertes hébétées… la nature profonde refait surface :

Homo Sapiens est un animal avarié qui a mal tourné.

Un mal indolore

… il y a 7 200 000 années ! au moment de sa séparation avec les ancêtres des singes actuels.

S’il est un roseau pensant (comme l’a complaisamment qualifié Blaise Pascal dont le visage couleur cachet d’aspirine ornait les anciens billets de 500 francs) et cherche à transformer son environnement comme les termites ou à comprendre dans quel monde il est tombé… ce n’est pas parce qu’il est animé d’une mission divine ! mais pour occuper son esprit. Ou si vous préférez (paradoxe) = pour s’empêcher de penser au carré !

Penser rend fou.

Les animaux pensent mais ne se posent pas tout un tas de questions à la con ! Éros et Thanatos = naître / mourir / et entre temps se reproduire… semble pour eux un horizon indépassable. Ce doit être le cas de la plupart des formes d’intelligences avancées dans l’Univers observable. Reste à espérer ! → difficile d’admettre que la présence d’une tare soit « la » condition sine qua non pour un degré d’évolution élevée.

Le bonheur idéal disait Sophocle serait de ne pas penser

Se prémunir contre ce mal indolore semble (à l’inverse des Mouchottiens) être le cas des habitants du village (dont est originaire le personnage principal) qui vivent en harmonie avec leur environnement. Comment font-ils ? → ils évitent de se poser trop de questions ! Ce qui est le cas en particulier du curé Merdougue (saint homme et conscience de la petite communauté) qui passe ses journées à pêcher le gardon alors que le Bertou préfère la pêche au goujon. Non c’est le contraire : Merdougue = goujon / Bertou = gardon.

Goujon ou gardon ?

Connaissez-vous un plus grand malheur pour un animal qu’être un Homme ?

(Re) devenez humain

Quand le roman s’achève… en pertuelle détresse le principal protagoniste cherche à fuir obstinément la société feel good d’informations compassionnelles en boucle qui a envahi tous les interstices de la vie privée (sexualité / croyances / civilités / injonctions à penser le bien / etc.). Dont la philosophie ambiante est assez bien résumée par un robot « hôtesse d’accueil ». Qui ponctue chacune de ses phrases par :

Pas de problème !

Lorsqu’il prend conscience qu’il ne reste plus sur terre un mètre carré qui n’a pas été exploré ni le moindre recoin d’Internet où se cacher des algorithmes ! poursuivi par un livreur de pizzas il n’a d’autre issue que de se jeter dans la Garonne. Façon comme une autre d’arrêter le flux ininterrompu de pensées qui ne cesse de le tourmenter depuis sa naissance.

Se jeter dans la Garonne ou manger une pizza ! that’s the question.

Si ce roman ressemblait aux romans d’aujourd’hui (auxquels on peut ajouter une bonne partie de ceux de la seconde moitié du XXe siècle) qui sont des dystopies déguisées et des crises de neurasthénie en plein air ! on en serait resté là. Ce serait sans compter sur Non-Augustine de Cadaujac (143 ans / pensionnaire de la Maison de retraite des Pé-tété de la Gironde) et un lancer de chaussure intempestif à 320 kilomètres à l’heure dans le TGV Paris-Irun de 7h 28. De quoi vérifier le proverbe : tout est bien qui finit bien ! 

Dans l’univers romanesque il n’y a rien qui n’ait son moment décisif pour échapper à la détresse… Le dernier des mouchottiens réalise (après l’avoir lu dans un journal!) qu’il a une « civilisation à sauver et un idéal à défendre! » Traduction : Pour survivre l’homme a besoin de se bercer d’illusions.

La Liberté… c’est de là que viennent tous les ennuis du monde.

2a-Notre-dame-bardot

La littérature fragmentée

À l’Homme fragmenté correspond une littérature fragmentée.

Contemporaine du surfing sur le Net (quand tout est connecté on ne peut plus créer). Où l’on passe indistinctement d’un reportage en direct sur l’incendie de Notre-Dame de Paris aux fesses de Brigitte Bardot dans un film de Jean-Luc Godard. Comme le Décaméron de Boccace la particularité du roman est d’être composé de 303 chapitres courts (contre 101 pour Boccace) qui sont autant de « petites histoires » désopilantes (en fait ! c’est la vie qui est désopilante !).

Qui au final n’en font qu’une.

Quand s’achève le récit… le post-scriptum qui se déroule « au pays des mots » est là pour rappeler que tout cela « n’a eu lieu » que dans la tête de l’auteur (ce qui est vrai aussi pour le lecteur !). Ce qu’annonçait déjà le prologue:

Rien n’existe de par le monde qui ne naît dans la cervelle.

Un bouquin hors norme

A lire et à relire en tous sens. Par petits bouts (dans les transports / en se rendant au bureau / le soir avant de s’endormir etc.) ou d’une traite… Disponible en version e-book ou papier imprimé.

Encore vivant(e) ?
Prouvez le !

Résumé de l’ouvrage → j’aimerais vous en dire plus mais cela gâcherait ! 

En fait non. Autant dire la vérité : récapituler 303 petites histoires... serait aussi long (presque) que de les raconter. Autant lire le livre. Frustré(e) ?

Que serait le monde sans mystère ?

Le mystère sans curiosité maladive ? → preuve que vous êtes vivant(e) / pas encore englué(e) dans ces petites morts qu’on appelle habitudes. Vous voulez vous en sortir. Vous décrasser les méninges vous sentir libre... Je le sens :

SONDAGE

À votre avis : qu’est-ce qui mène le monde ?

Si vous avez répondu 1/2/3/4/5/6/7 ou 7bis !
À bas ! la Liberté a été écrit pour vous !

Il y a de multiples façons d’aborder À bas ! la Liberté. Comme... un croquis d’après nature du génome humain ! Une réponse à l’épineuse question : peut-on habiter le virtuel ? Un dernier inventaire avant perte définitive de l’animalité. Un mode d’emploi de l’existence humaine... Un retour aux fondamentaux du roman. Une revanche de l’ordre mental sur le chaos du Monde. Ou encore... une actualisation du projet de Montaigne : Qui suis-je ? Que sais-je ? À quoi il convient d’ajouter : Que faire ?

À savoir : Comment s’occuper (intelligemment !) en attendant la mort ?

Croyez-moi :

Vous avez besoin de ce livre comme d’une respiration.

À BAS ! LA LIBERTE
Dernier inventaire avant perte de l’humanité – 2020 / première livraison:

Tome 1 → Le Genre humain (human hope)
Première époque :
NOS INSTINCTS SE PORTENT BIEN (1974 - 1981)
Les Mouchottiens sont pleins d’espoirs / gavé de consommation (sexuelle / études supérieures / temps libre / tourisme hors des frontières etc.) et vivent sans le savoir une des périodes les plus heureuses de l’histoire de France (élévation continue du niveau de vie / libertés tous azimuts / plus grande période de paix de l’histoire de France etc.). Ce que rend très bien l’illustration de Paella (ci-dessus) où les protagonistes du roman ont l’air de buller (comparez avec l’immeuble haussmannien d’Edmond Texier) et d’appliquer à la lettre leur cri de ralliement : travailler c’est bon pour les gens qui n’ont rien à faire

Tome 2 → La Nappe humaine (human fate)
Deuxième époque: LE MONDE EST DE TROP (1981 - 1999)
Troisième époque: LE MONDE NEST PAS UNE SOLUTION (1999 - 2019)

Peu à peu les Mouchottiens quittent l’immeuble. Fonction d’événements de tous ordres on suit leur dispersion. Ils se retrouvent réunis à certaines occasions : Leçon inaugurale de Marc Marcus au Collège de France /enterrement de la mère du Grand Roux. Avec le temps beaucoup de choses ont changé. Le moral n’est plus là : avant on était bien ! sans savoir pourquoi. A présent on est mal ! en croyant connaître la cause : le monde est vieux (en fait ce sont les Mouchottiens qui ont vieilli !). A mesure que se rapproche la chute dans le néant… l’ombre du passé occupe une surface plus grande et l’avenir rétrécit.

Que restera-t-il de cette histoire quand tout aura disparu ? Il restera les mots. Car ils sont si friables si inconsistants si vains si tendres si frivoles qu’ils ont quelque chose à voir avec l’éternité : ils sont l’Eternel même.